Hypoglycémie
À retenir
- L’hypoglycémie se définit par une glycémie < 3,3 mmol/l (<2.6 mmol/l chez le NN dans le premiers 48 h de vie). Elle peut révéler une maladie métabolique ou endocrinienne sous-jacente.
- Un bilan métabolique et hormonal est indiqué si glycémie < 2.8 mmol/l où si glycémie < 3.3 mmol/l symptomatique (sauf si enfant avec diabète ou maladie métabolique connue)
- Bilan à réaliser AVANT la correction de l’hypoglycémie.
L'intégration des voies métaboliques (glycogénolyse, gluconéogenèse, lipolyse et oxydation des acides gras) et de multiples hormones de contre-régulation (glucagon, épinéphrine, hormone de croissance et cortisol) se combinent pour maintenir la normo-glycémie.
L'utilisation du glucose par le cerveau devient limitée à une concentration de glucose d'environ 3,0-3,6 mmol/L. Les symptômes neurogènes sont perçus dès une concentration de glucose <3,3 mmol/L.
L'augmentation de la cétogenèse est considérée comme un changement physiologique dans le cadre d'une contre-régulation, par exemple après un jeûne prolongé, qui protège le cerveau en fournissant une source de carburant alternative. L'insuline inhibe la cétogenèse.
Corps cétoniques : acétone, acétylacétate et β-hydroxybutyrate (β-OHB) (mesurable en capillaire)
Définitions:
- L’hypoglycémie se définit par une glycémie < 3,3 mmol/l, (< 2.6 mmol/L chez le NN dans les 48 premières heures de vie)
- Hypoglycémie sévère: <2,8 mmol/L (50 mg/dL) ou symptomatique
- Ce seuil semble adéquat pour pouvoir interpréter les réponses métaboliques et neuroendocriniennes mesurés lors d'une hypoglycémie.
- Hypocétose : concentrations de β-hydroxybutyrate (β-OHB) < 0.6 mmol/L en présence d’hypoglycémie
- Cétose modérée : concentrations de β-hydroxybutyrate (β-OHB) > 0.6 - 1,5 mmol/L
- Hypercétose : concentrations de β-hydroxybutyrate (β-OHB) > 1,5 mmol/L
- Acidocétose : concentration de β-hydroxybutyrate (β-OHB) > 3,0 mmol/L et acidose métabolique qui en résulte.
- Hyperlactatémie : lactate > 1.8 mmol/L
Sur le plan clinique il est difficile de définir une concentration spécifique du glucose plasmatique comme "hypoglycémie", car
- les seuils des réactions cérébrales spécifiques à l'hypoglycémie se produisent dans une gamme de concentrations de glucose plasmatique ;
- il n'est pas possible d'identifier une seule valeur de glucose qui provoque des lésions cérébrales, et l'étendue des lésions est influencée par d'autres facteurs, tels que la durée et le degré de l'hypoglycémie ;
- les artefacts potentiels et les facteurs techniques qui entraînent des inexactitudes dans la détermination du glucose peuvent compliquer l'interprétation d'une valeur glucose unique.
Signes cliniques:
- Adrénergiques
- sudation
- tremblements
- faim
- maux de ventre
- vomissements
- faiblesse
- pâleur
- irritabilité
- Neuroglycopéniques
- irritabilité
- trouble du comportement
- trouble de la concentration
- céphalées
- convulsions
- vertiges
- coma
Diagnostic différentiel:
- Patient sous insulinothérapie exogène (patient avec diabète traité)
- Hypoglycémie cétonique idiopathique
- Insuffisance hépatique
- Trouble d'oxydation des acides gras (p.ex. déficit en MACD)
- Déficit en carnitine
- Déficit de gluconéogenèse
- Déficit de glycogénolyse
- Acidémie organique
- Insuffisance cortico-surrénaliénne
- Déficit en hormone de croissance
- Hypopituitarisme
- Insuline endogène (Hyperinsulinisme) (absence de cétose)
- Iatrogène
L'hypoglycémie néonatale (glycémie <2.6 mmol/L) asymptomatique est fréquente dans les premières 48 heures de vie après la naissance des nouveau-nés à terme en bonne santé. Ensuite, elles augmentent lentement mais régulièrement au cours du premier jour de vie et restent stables jusqu'à 48 heures (glycémie moyenne (ET), 3,3 (0,6) mmol/L) jusqu'à ce qu'un nouveau plateau soit atteint au quatrième jour de vie. Une minorité de nouveau-nés présentent une hypoglycémie plus prolongée et plus grave, généralement associée à des facteurs de risque spécifiques et éventuellement à un syndrome d'hypoglycémie congénitale tel qu'un hyperinsulinisme.
Au vu que même une hypoglycémie néonatale modérée est associée à une augmentation considérable des séquelles neurodéveloppementales négatives, le seul de 2.6 mmol/L est acceptée comme valeur numérique standard pour définir l'hypoglycémie néonatale (https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27605513/).
Hypoglycémie hypo-cétonique
- Troubles du cycle de la β-oxydation des acides gras et du glycérol tel que le déficit en MCAD
- Maladie mitochondriale
- Hyperinsulinisme
Hypoglycémie cétonique idiopathique : le plus souvent observée chez des enfants normaux souffrant d'une maladie aiguë intercurrente provoquant une famine prolongée et une augmentation du métabolisme due à la fièvre. Chez ces enfants, l'hypercétonémie avec euglycémie semble plus fréquente que l'hypercétonémie avec hypoglycémie. Enfants souvent petits et minces pour leur âge. Le manque d'appétit peut être causé par l'hypercétonémie, ce qui induit un cercle vicieux provoquant d'autres cétonémies.
Hypoglycémie cétonique pathologique : épisodes symptomatiques récurrents, ou occasionnellement symptomatiques, avec bêta-hydroxybutyrate ≥ 1,0 mmol/L et glycémie < 3,9 mol/L, en l'absence d'un jeûne prolongé (jeune de < 12 h chez un enfant < 5 ans hors période néonatale, ou <24 h si > 5 ans) , ou si signe clinique suspecte : organomégalie, retard de croissance, atteinte multi organique, signes d’insuffisance surrénalienne (Addison). Des symptômes neuroglycopéniques malgré l'hypercétonémie protégeant le cerveau peuvent suggérer un défaut d'utilisation ou de transport des cétones chez ces patients.
Etiologie possible: Déficiences dans les hormones régulatrices telles que le cortisol ou l'hormone de croissance, ou dans les conditions métaboliques telles que les maladies de stockage du glycogène (GSD, en particulier GSD 0, III, VI et IX), les troubles du transport et de l'utilisation des cétones, et les défauts dans le métabolisme des protéines.
Seule une minorité d'enfants souffrant d'hypoglycémie cétonique reçoivent un diagnostic de trouble endocrinien ou métabolique.
Points importants anamnèse et examen clinique en Urgence :
- Date/heure du dernier repas et sa composition, Prise de toxique/médicaments, Hypoglycémie néonatale, anamnèse familiale
- ABCDE = prise en charge adaptée selon atteinte, Poids +/- taille, status complet en particulier rechercher hépatomégalie, anomalie de la ligne médiane, examen neurologique (cf neuroglycopénie)
Mesurer
1) En cas de suspicion clinique
Mesure capillaire
- Glycémie
- Corps cétoniques ( l’acide 3-béta-hydroxybutyrique (3HB) ), p.ex avec FREESTYLE® PRECISION b-CETONE
Gazométrie
2) Si hypoglycémie < 2.8 mmol/L (<2.6 mmol/L chez le nouveau-né pendant les premières 48 h de vie) et / ou signes d'alerte/trouble de l'état de conscience en dehors d'un diabète traité par insuline:
A) Analyse SANGUINE - A prélever obligatoirement avant resucrage , utiliser un KIT si disponible.
- Glucose (laboratoire)
- Lactate
- Gazométrie (pH, HCO3 - , pO2, pCO2)
- Sodium (Na), Potassium (K), Chlorure (Cl)
- ASAT, ALAT
- CK (créatine kinase)
- Ammonium
- Profil Acylcarnitines
- Corps cétoniques semi-quantitatifs :
- ß--hydroxybutyrate
- Acétoacétate (3-hydroxybutyrate)
- Acides Gras Libres (NEFA)
- Acides aminés complets
- Cortisol, (ACTH si possible)
- Insuline, C-peptide
- Hormone de croissance (HGH)
- Réserve de sérum pour dosages ultérieurs éventuels
- +/- Toxiques sanguins (ethanol, methanol, ethylène glycol, Béta-Bloquants etc)
B) URINES (portion) : 1ère miction après l’hypoglycémie (le resucrage ne doit pas être retardé pour prélever les urines)
- Stix urinaire (Corps cétoniques)
- Acides Organiques
- +/- Toxiques urinaires
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Traitement
Si le patient est conscient et ne vomit pas:
- Glucose p.o. : 0.3 g/kg, soit 10–20 g
- p.ex. 2 cuillères de sucre (env 12,5 g de glucides pour 1 cuillère à soupe (15 ml))
- 100 ml jus de fruits (10 g de glucides par 100 ml)
- 200 ml de lait.
- Pour les nourrissons souffrant d'hypoglycémie néonatale le gel oral de dextrose (plus précisément Dextrose gel buccal 40 %: 0.5 ml/kg (200mg/kg)) administré directement sur la muqueuse buccale semble un traitement de première intention efficace et sûr.
Si état de conscience altéré:
- Bolus G10%: 2-5 ml/kg, ou Glucose 20%: 1-2 ml/kg en i.v. perfusé lentement: 2 à 3 ml par minute.
- Poursuivre selon le cas avec glucose 3-5 mg/kg/min pour l'enfant >2 ans (pour les nourrisons: 5-8 mg/kg/min (G10% 3.5 - 5 ml/kg/j))
- En absence de possibilité de perfuser: Glucagon: Baqsimi ® par application intranasale ou GlucaGen® HypoKit® i.m.
- Pour les nouveau-nés: faible évidence que le glucagon peut augmenter le glucose de ∼2,3 mmol/L dans les 1 à 2 heures suivant son administration (Glucagon Swisspeddose)
En cas d'hyperinsulinisme: contacter endocrinologue pédiatre, discuter traitement par diazoxide, octréotide
Surveillance
- Contrôle de glycémie toutes les 15 à 30 minutes après le bolus initial de glucose
- Cible: glycémie ≥ 4 mmol/L
- Surveillance aux 30 à 60 minutes pendant au moins 4-6 heures
Selon résultats: discuter l'indication à une épreuve de jeûne en milieu spécialisé dans un deuxième temps
Suivi en cas d'hypoglycémies cétoniques à répétition:
- Alimentation adaptée comprenant des glucides complexes, des protéines, des collations entre les repas, parfois ajout de l'amidon de maïs non cuit et/ou du maltose pendant la nuit.
- Surveillance à domicile à l'aide de lecteurs de glycémie et de cétones, en particulier au réveil le matin ou en cas de symptômes.
- Les CGM (capteur du glucose en continu) peuvent être utiles, mais on doit tenir compte de leur imprécision à des niveaux de glucose inférieurs.
Cette situation, comme beaucoup d'autres maladies chroniques métaboliques, n'affecte pas seulement l'enfant, mais crée des défis quotidiens pour les familles, proches et les soignants. Le plus important de ces défis est la peur des crises d'hypoglycémie.
Hypoglycémie:
- Correction de l'hypoglycémie ≥ 4 mmol/l
- Correction de la cétose
Diagnostic étiologique
- Analyses moléculaires
- Seule une minorité d'enfants souffrant d'hypoglycémie cétonique reçoivent un diagnostic de trouble endocrinien ou métabolique.
SIGNES D’ALERTE: Hospitalisation ET perfusion systématique, avis sénior systématique +/- avis métabolique et/ou endocrinologique
Hypoglycémie profonde (≤2.2mmol/L (= 0.40g/L)) ou très symptomatique (trouble de la conscience, crise convulsive) ou hypoglycémie persistante/récurrente
- Hypoglycémie de jeûne court (inférieur à son temps habituel entre 2 repas en journée) . Exx. hyperinsulinisme ou glycogénose
- Nouveau-né macrosome: Exx. hyperinsulinisme néonatal
- Cétonémie insuffisante < 2mmol/L ou = 1 croix de cétonurie en cas de jeûne de durée inhabituelle pour l'âge. Ex. déficit d’oxydation des acides gras, hyperinsulinisme, déficit en cétogenèse
- Si défaillance d’organe associé (insuffisance cardiaque / hépatocellulaire, myolyse), acidose sévère (pH<7,10)
ex. déficit d’oxydation des acides gras - Si hyperlactacidémie >4mmol/L ex. déficit d’oxydation des acides gras, déficit de néoglucogenèse, glycogénose, acidurie organiques
- Hépatomégalie ex. Glycogénose
- Si Croissance staturale ou pondérale anormales, ou syndrome de la ligne médiane ex. déficit en GH
- Hyponatrémie, hyperkaliémie, cholestase néonatale, mélanodermie ex-Déficit corticotrope
- Si cétonémie persistante > 1mmol/L après 12h de perfusion ex. déficit de cétolyse ( plutôt : de l’utilisation des cétones ?)